Pourquoi formuler vos émulsions de bitume ?

Formulation des émulsions de bitume

Introduction

Les émulsions de bitume sont utilisées dans le domaine routier pour la construction de nouvelles routes et pour l’entretien du patrimoine. Certains pays en pointe dans ce domaine, comme la France, emploient plus de 30% du bitume sous cette forme, tandis que d’autres se cantonnent à leur simple application en couche d’accrochage, ou même poursuivent l’utilisation de liants fluidifiés.

Pourquoi formuler ses émulsions de bitume ?

La France produit chaque année environ 800 000 tonnes d’émulsions, soit près de 10% de la production mondiale, ce qui la place 3ème pays producteur au monde, derrière les Etats-Unis (1er avec plus de 2 millions de tonnes) et plus récemment la Chine (2nd avec 820 000 tonnes). Cependant, ce tonnage rapporté à la taille du réseau routier place la France en acteur majeur avec 0.7 tonne d’émulsion par kilomètre de route, contre 0.3 et 0.2 t/km pour les Etats-Unis et la Chine, respectivement. L’analyse des données mondiales recueillies par l’IBEF (International Bitumen Emulsion Federation) permet de voir que d’autres pays misent sur le développement des techniques à l’émulsion pour développer leur réseau routier. C’est le cas par exemple du Mexique, de la Thaïlande, de l’Afrique du Sud, de l’Espagne, ou plus récemment au Maroc.

Pays producteurs d'émulsions de bitume 2016
Les principaux pays producteurs d’émulsions de bitume en 2016.

Dans tous ces pays où les émulsions se développent, parfois pour des raisons différentes, une constante apparaît : l’acquisition de la maîtrise de la formulation. Car si les techniques d’enrobage à chaud traditionnelles nécessitent le répandage d’émulsions d’accrochage « simples » lors de la mise en place, pour solidariser les différentes couches d’une chaussée entre elles, les techniques à l’émulsion, dites « à froid », nécessitent l’apprentissage des principes de base (physiques et chimiques) qui permettent de maîtriser la stabilité du bitume sous cette forme vectorisée transitoire. Seule l’acquisition de cette maîtrise rend possible le développement d’autres applications, comme les enduits superficiels d’usure, les matériaux bitumineux coulés à froid, les enrobés stockables à froid pour le bouchage d’urgence des nids de poule, ou encore les émulsions de recyclage permettant la réutilisation in situ de la ressource minérale déjà mobilisée. De la capacité de formulation d’une entreprise découlera la performance de ses applications, par l’adaptation de ses produits aux conditions climatiques du chantier ou aux matières premières disponibles localement.

Cette autonomie de formulation donnera à l’industriel la capacité de s’adapter, d’améliorer et d’accroître son aptitude à répondre aux enjeux actuels mais aussi futurs, qu’ils soient d’ordre économique ou environnemental. Faut-il rappeler que les techniques à froid sont très efficaces dans ces deux domaines ?

Acquérir l’autonomie

Au sein des entreprises de travaux routiers, le laboratoire de contrôle est parfois perçu comme une structure de coûts. Mais compte-tenu de la grande sensibilité des techniques à l’émulsion à de multiples paramètres, comme la qualité des matériaux minéraux et organiques, chimiques, les moyens matériels et humains, le laboratoire devient un acteur incontournable de la maîtrise. Cette évidence dans les pays les plus en pointe n’est parfois pas suspectée lors de la mise en service de nouvelles unités de production dans d’autres pays. Pourtant, une émulsion d’accrochage, aussi « simple » et « invisible » soit-elle une fois recouverte de l’enrobé qu’elle colle, constitue une des clés de la durabilité d’un revêtement routier. Sa réussite doit mobiliser l’attention tout autant que l’enrobé. Le laboratoire devient le centre névralgique du développement des compétences, avant transfert des formules établies en usine, où les erreurs, qui impliquent fatalement des quantités de matériaux importantes, sont évitées.

En effet, la production industrielle d’émulsion implique des groupes de production dont le cœur est constitué d’un moulin colloïdal, comme le moulin Atomix®, breveté en 1933 et fabriqué par la Société Emulbitume. Ces moulins permettent la dispersion du bitume sous forme de fines gouttelettes dans une phase aqueuse objectivement formulée. Ces outils sont en général dimensionnés pour produire de 5 à 30 tonnes/heure. Leur démarrage implique a minima la fabrication de 3 à 5 tonnes d’émulsion. Avec de tels outils, adapter une formule ne peut se faire qu’à l’instinct, par de petites modifications quantitatives pour éviter les échecs coûteux. Le test de nouveaux matériaux, comme le bitume, un émulsifiant, un additif ou des variations de proportions, ne peut être envisagé méthodiquement car cela mettrait en jeu des quantités aussi importantes qu’onéreuses.

La solution se trouve donc au laboratoire, par l’utilisation d’outils dédiés. Les Pilotes de Laboratoire, avec lesquels des dizaines de conditions différentes peuvent être testées sans générer de pertes significatives en matériaux, sont de véritables mini-usines utilisables dans des étapes de pré-formulation ou de contrôles de matériaux (Pilote de Laboratoire Simplifié Emulbitume), jusqu’à la production des émulsions les plus complexes impliquant des bitumes durs, ou modifiés aux polymères, et dont le bilan thermique impose le travail sous pression (Pilote de Laboratoire complet Emulbitume).

Pilote de laboratoire simplifié
Pilote de laboratoire simplifié Emulbitume – Atomix C® Inside
Pilote de laboratorie complet EMULBITUME ATOMIX
Pilote de laboratoire complet Emulbitume – Atomix C® Inside

Ainsi équipé, le laboratoire devient capable de tester les performances de ces émulsions, a priori plutôt qu’a posteriori, en maîtrise plutôt qu’à ses dépens. En faisant varier la teneur en tensio-actif, le formulateur ajuste précisément le comportement à la rupture de son émulsion en fonction des matériaux du chantier. Ou encore, il adapte sa viscosité en fonction du support d’application, de la saison ou des conditions météorologiques. Cette prise d’autonomie devient synonyme d’anticipation, et va de paire avec l’acquisition d’une expérience nouvelle, de compétences techniques, qui permettront la formation et la sensibilisation de tous les acteurs de l’entreprise, de la production jusqu’à l’application. En outre, le formulateur développera les compétences qui lui permettront d’optimiser ses interactions avec son partenaire fournisseur de tensio-actifs et additifs, qui était jusqu’alors son unique source de maîtrise.

En d’autres termes, la compétence laboratoire en matière de formulation des émulsions permet à l’entreprise de sortir de l’empirisme, de gagner en expertise, de maîtriser ses coûts de production, de réduire le risque d’échec sur chantier. C’est un investissement qui rapporte !

Se tourner vers l’avenir

Depuis plusieurs années, et de façon encore plus nette en cette année 2021, où la crise sanitaire que nous traversons ajoute une pression supplémentaire au secteur de la construction routière, nous assistons au renforcement des attentes sociétales en terme d’environnement. La preuve a déjà été faite que les techniques à l’émulsion répondent aux attentes économiques autant qu’environnementales. Les quantités moindres de matériaux engagées, l’absence de séchage des granulats, la possibilité de recyclage en place des chaussées existantes par des liants spécifiquement formulés ou d’utilisation de liants de substitution sont autant de solutions potentielles pour relever les challenges qui nous font face. En Europe par exemple, des projets ont vu le jour, qui visaient à constituer une base de données des pratiques les plus vertueuses en matière d’environnement.  Le projet collaboratif TRACC-Expert (France, Portugal, Espagne) puis TRACC-France (pour Techniques Routières Atténuant le Changement Climatique), a impliqué de nombreux acteurs publics et privés du secteur (CEREMA, Conseil Départemental, SPRIR, IDRRIMIFFSTAR et beaucoup d’entreprises) dans un but commun. Ces projets ont abouti au développement d’un logiciel d’aide à la décision.

Malheureusement, l’accès aux techniques à froid n’est pas aisé. La compétence est bien présente au sein des grands groupes, où le savoir se transmet de génération en génération, mais elle est plus difficile à acquérir dans les entreprises qui ne la détiennent pas, les volumes de formation théorique et pratique des futurs jeunes techniciens et cadres à ces techniques restant faibles, en dépit du pourcentage élevé de liants bitumineux appliqués sous forme d’émulsion. C’est la raison pour laquelle, en plus d’une offre en équipements de laboratoire centrée sur les émulsions, Vialab propose des formations théoriques et pratiques, permettant aux entreprises d’acquérir la compétence ou de consolider leur savoir-faire.

Vincent HESRY, CEO de VIALAB

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